A Pibarnon, décembre 2018

Chers Amis de Pibarnon,


Les millésimes se suivent et… ne se ressemblent pas ! 2018, à plus d’un titre, est remarquable et mémorable. Tout d’abord, et ce n’est pas le moindre des sujets, c’est le 40ème de la famille sur le Domaine. Beaucoup d’entre vous ont eu l’occasion de goûter les plus anciens, comme le mythique 1982, le sensuel 1985, le duo remarquable et envoûtant des 1989 et 1990.
D’autres, venus au Domaine plus tard, ont parfois encore en cave du 1998, monstre sacré, ou du 2001, au charme sudiste et masculin dévastateur… Les 2005 sont fringants et frais, les 2007 montrent une complexité rare ! Le 2010 entame tout juste la période des bouquets secondaires et de la 1ère apogée. 2011, déjà, se rappelle à notre bon souvenir.
Chacun désire être sur le devant de la scène, sans pour autant briguer la célébrité. J’ose emprunter à Victor Hugo ce vers illustre pour éclairer le terroir de Pibarnon, « chacun en a sa part et tous l’ont tout entier ».
4 décennies de vinifications, autant de souvenirs, d’implication, et de tentatives d’exprimer chacun de ces vins au meilleur de leur climat, de leur style, en affinant toujours plus au fil du temps notre influence, la plus légère possible. Laisser le terroir s’exprimer…

LE MILLESIME 2018

2018 est dans cette veine, d’intuition, de finesse, d’équilibre. Ce millésime, marqué par une humidité permanente au printemps et au début de l’été, a permis l’épanouissement de la vie du sol, mais aussi le développement du mildiou.
Rarement nous n’avions eu une telle pression. Finalement, en décidant de ne pas traiter à tors et à travers, nous avons aidé la vigne à s’adapter et murir ses raisins. Très peu de cuivre donc cette année, les sols sont préservés et le vignoble s’est défendu seul, grâce à nos méthodes de culture et sans-doute grâce à la biodynamie. Le calcaire a ceci de remarquable qu’il est mouvant en permanence et que ses sols sont vivants. Sa manière de drainer l’eau et de la retenir, sa dynamique alcaline, les plantes locales qui le colonisent, sont autant de freins au développement de déviations endémiques. Il y règne une vraie sérénité, finalement.

Le rouge 2018 est un vin que l’on pourrait qualifier de « transition », un millésime reposant et de structure moins affirmée que ses frères. Mais ce qui compte c’est l’équilibre, la silhouette, la finesse et l’appartenance à la famille. A l’instar du 2007 (toujours fringant et altier à l’heure actuelle), du 1995, ou du 2004, ce 2018 sera un bel exemple de ce que le mourvèdre peut donner en suavité, bouquets et minéralité. Ce millésime est tout à fait dans la tendance de l’évolution de nos vins : peu d’extraction, beaucoup d’amplitude et d’énergie. L’harmonie végétale est déjà en place. L’élevage fera le reste, se chargera d’amener doucement les tannins vers plus de longueur, de soyeux, en gardant leur précision et leur fraîcheur.
A ce sujet, nous venons de faire entrer dans la cave le « Stradivarius » des foudres, venant du Sud-Tyrol, un volume de 54HL, qui vient d’intégrer la parcelle Bel Air 2018 en élevage. Un écrin qui va magnifier et respecter l’intégrité de cette parcelle, tout en lui apportant l’oxygène nécessaire à son élevage. C’est le premier venant de ce remarquable artisan, mais une série est en train de naître ! Le rouge 2018 est disponible en primeur, comme chaque année. Vous en connaissez le principe.

Le rosé 2018 se porte comme un charme… Son assemblage de mourvèdre (majoritaire) - cinsault, lui assure une magnifique texture, soyeuse, longue, et sapide. Encore quelques mois avant que ce vin ne se mette en place, en général autour de Pâques ou mi-mai. Mais vous le savez, ce n’est que le début d’une longue et lente évolution qui dure avec harmonie.
Le 2018 est plein de fruits rouges, grenade en particulier, mais aussi d’abricot et cette gamme végétale noble propre au mourvèdre qui lui donne une classe certaine et une belle élégance.

Son frère, Nuances, pur mourvèdre, élevé en jarres de grès et en foudre est loin de sa mise en bouteilles et de sa disponibilité, puisque nous le lancerons seulement en 2020…

Le Blanc 2018 est un jeune et fringant personnage, juvénile, vibrant et plein de fraîcheur. Une belle précision aromatique, de fruits et fleurs blanches, peu d’exubérance, mais une longueur tactile et sapide. Un vin dépouillé du superflu, mais plein de substance. Un vin de lumière. N’oubliez pas de le réserver ou de vous le procurer avant le mois d’août, car sa production est faible au regard de son attrait…

ILS SONT DISPONIBLES

Les Restanques de Pibarnon
Le vin des Restanques de Pibarnon a fait un beau chemin depuis sa naissance. Au départ issu seulement de jeunes vignes, ce vin s’est affirmé comme venant d’un terroir différent du Château, un peu plus bas sur la colline, là où il était encore possible de s’étendre un peu… Le sol plus argileux le met en demande de grenache, qui atteint 30%, pour assagir un mourvèdre de style plus latin sur cette matrice.
Le millésime 2015 des Restanques jouit d’une personnalité plus sphérique, plus immédiate, mais aussi d’un magnifique équilibre hédoniste très attirant. C’est un compagnon de table, de joie et de mets plus canailles, mais aussi de raffinement. A déguster en attendant la maturité des vins du Château.

Le Rouge du Château de Pibarnon.
Vous le savez depuis longtemps, les vins rouges issus de ce terroir particulier jouissent d’une texture ciselée, élégante et fraîche, sapide, aérienne qui magnifie le mourvèdre. C’est ainsi qu’il domine franchement l’assemblage, à plus de 90%, tout en exaltant sa complexité chatoyante et son allure altière. Le mourvèdre s’y présente comme un personnage romanesque, atypique, gracieux, cultivé.

  • Le Rouge 2016 est un modèle d’énergie, de fruits, de rebonds. Un vin qui part encore un peu tous azimuts, mais qui va se mettre en place royalement au fil du temps, d’un incroyable équilibre, et acrobate à la fois. Dense et aérien, en puissance et en dentelle. Assez fascinant en réalité…
  • Le Rouge 2015 est un grand vin ample et ciselé, rafraîchi par des tannins mûrs, amplifiés par l’écho de sa complexité végétale. Fraîcheur et longueur, sur une texture fine et tactile. Beaucoup de charme et de réserve.
  • Le Rouge 2014 est un vin de profondeur, comme on les aime au Domaine. Sapide, séveux, dense et profond, oscillant entre fruits noirs, épices et bois rares, son équilibre actuel nous permet de l’ouvrir sur beaucoup de viandes, que ce soit du bœuf, de l’agneau, du canard au sang…

Les Rosés et l’Huile d’Olive

  • Le Rosé 2017 prouve une fois encore que ce rosé se boit toute l’année, à toutes les saisons, et sous tous les méridiens !
    Il suffit de ne pas trop se presser et de lui laisser le temps de s’épanouir. Débarrassé de son habit estival, il entre maintenant dans la saison froide sous des ors subtils et une minéralité altière.
  • Le Rosé Nuances 2016 surprend toujours son monde ! C’est incroyable ce que ce pur mourvèdre, vinifié et élevé en foudre et jarre de Grès, exprime de fruits rouges, d’épices, de puissance, de longueur et de chair juteuse. A tester si vous aimez le rosé (ou pas !) sur des viandes blanches, des abats blancs, du foie gras, un carpaccio de langoustine, et toutes les idées colorées que vous aurez ! Une garde lente pour ce vin hédoniste et de contemplation.
  • Huile d’Olive. Je vous l’annonçais l’année dernière, nous avons un peu d’huile d’olive produite à partir des oliviers du Domaine. Deux huiles différentes, l’une typée fruité vert, l’autre plutôt fruit mûr. Les deux issues de variétés gélives de bord de mer, la Caillon et la Brun, qui se caractérisent par leur densité et leurs arômes.

Tout cela me met l’eau à la bouche… J’ai simplement envie de monter de la cave pour me mettre aux fourneaux, tenter quelques accords classiques ou audacieux, profiter des artisans de bouche qui nous entourent maintenant, puis m’assoir tranquillement à table avec l’un de ces vins carafé, en bonne compagnie. Je vous invite à faire de même, à dénicher (ou enfouir en cave) un Pibarnon et partager ces beaux instants avec vos proches. Et dès que ces agapes seront terminées, retrouvons-nous au caveau pour une belle dégustation.


Bien cordiales pensées,

Eric de Saint-Victor

signature initiales
1 décembre 2018